La motivation

Dans le contexte actuel, les élèves auxquels nous devons enseigner ont souvent de grandes attentes envers nous. Très stimulés et en contact avec des technologies que nous apprenons à connaître, il n’est pas toujours évident de capter leur intérêt. La motivation, c’est l’enjeu principal de la génération d’enfants actuelle. Comment faire en sorte que l’élève ait le goût de faire des efforts, de s’engager dans sa vie scolaire?

Dans cette rubrique, je vous propose à la fois des assises théoriques sur le sujet et des interventions qui, selon moi, pourraient nous amener sur la bonne voie!

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LA MOTIVATION SCOLAIRE

 

Ce qu’elle est

Définitions :

· Selon Gagné, la motivation est l’ensemble des forces qui poussent un individu à agir.

· D’après Archambault et Chouinard, la motivation scolaire est l’ensemble des déterminants internes et externes qui poussent l’élève à s’engager activement dans le processus d’apprentissage, à adopter des attitudes et des comportements susceptibles de conduire à la réalisation des objectifs d’apprentissage qu’il poursuit et à persévérer devant les difficultés.

La motivation a une direction, i.e., l’élève est motivé vers un sujet plutôt qu’un autre et elle a une intensité, i.e., l’élève s’engage rapidement ou lentement, beaucoup ou peu vers ce sujet.

D’où vient-elle?

a) Approche béhaviorale (Skinner, Bandura)

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La motivation est essentiellement extrinsèque (extérieure) à l’élève. Les comportements qui sont renforcés par l’environnement sont plus susceptibles de réapparaître que ceux qui ne le sont pas où que ceux qui ont été punis. L’élève recherche donc la récompense et il évite la punition.

Principaux facteurs de motivation en contexte scolaire:

  1. Socialisation
  2. Éviter de perdre la face
  3. Éviter les tâches trop difficiles
  4. Avoir de bonnes notes
  5. Recevoir de l’approbation
  6. Éviter la critique
  7. Apprendre des choses intéressantes

b) L’autodétermination (Deci, Vallerand)

Selon cette approche, un élève sera plus motivé s’il se considère comme la source et la cause principale de ses actions et s’il se sent compétent. De plus, un élève qui aime une activité s’engagera plus rapidement et plus intensément.

Motivation extrinsèque: L’élève s’engage dans un comportement afin d’obtenir quelque chose. Le renforcement vient après.

Exemple: l’élève fait un travail pour obtenir un collant

Motivation intrinsèque: L’élève s’engage dans une activité pour elle-même. Pour le plaisir qu’il en retire. Le renforcement vient pendant l’activité.

Exemple: l’élève fait un devoir de mathématiques car on aime les mathématiques.

c) Approche socio-cognitive (Bandura)

Selon cette approche, ce sont les opérations cognitives de l’élève qui déterminent son comportement. La priorité de l’élève est d’organiser et de conserver un système de croyances cohérent et fonctionnel. Les interactions avec l’environnement, particulièrement social, agissent sur le système de valeur.

Exemple: Si un élève ne réussit pas son but, un échec en sciences par exemple, il pourra diminuer l’intérêt qu’il a pour cette activité pour conserver son estime de soi.

Comment l’expliquer?

1. Modèle des attentes et de la valeur (Atkinson)

Motivation = Probabilité de succès x Valeur incitative du succès

  • perception de sa compétence
  • but à court, moyen ou long terme en
  • perception de contrôle
  • lien avec la tâche
  • intérêts pour la tâche
  • lien entre intérêt personnel et la tâche

Selon ce modèle la motivation dépend des attentes que l’élève a de réussir une tâche et de la valeur qu’il lui accorde. Pour que la motivation soit maximale la probabilité de succès doit être moyenne, car sur le plan de l’estime de soi, il est motivant pour un élève de chercher à faire une activité qui lui présente un défi et qui a donc un certain niveau de difficulté.

Exemple: Si une tâche est trop facile, l’élève n’y verra pas un moyen pour se prouver sa compétence, sa motivation sera donc faible.

2. Les attributions causales (Weiner)

Selon ce modèle, le comportement de l’élève dépend de ce qu’il retient des éléments qu’il perçoit pour expliquer ses succès et ses échecs. Donc, un élève peut attribuer ses succès à sa grande intelligence ou à la bonté de son enseignant ou aux efforts qu’il a déployés à étudier… Lorsque les événements n’ont pas d’influence importante sur l’image qu’un élève a de lui-même, ses perception attributionnelles ont peu d’effets sur ces décisions. En revanche, lorsque des événements importants surviennent, comme des échecs scolaires, les perceptions attributionnelles prennent une grande importance et influence la motivation.

Voici les causes invoquées par les élèves pour expliquer leurs succès ou leurs échecs scolaires.

ATTRIBUTION (cause) LIEU DE CONTRÔLE STABILITÉ CONTRÔLABILITÉ ÉMOTIONS RESSENTIES
succès échec
Aide Externe Instable Incontrôlable Gratitude Colère
Chance Externe Instable Incontrôlable Surprise Neutre
Tâche Externe Stable Incontrôlable Neutre Colère
Effort/stratégies Interne Instable Contrôlable Fierté Culpabilité
Aptitudes et intelligence Interne Stable Incontrôlable ou Contrôlable Fierté Honte

Lieu de contrôle : « Où se situe la cause? »

Permet de faire la distinction entre les causes internes à l’élève ( talent, effort, fatigue, etc.) et les causes externes (difficulté d’une tâche, chance, qualité de l’enseignement, camarades, etc.)

Exemple: La perception qu’un échec est dû à l’incompétence du professeur est une attribution externe.

Stabilité: « Est-ce que c’est toujours comme ça? »

Permet de différencier les causes quant à leur temporalité. Une cause est stable lorsqu’elle a un caractère permanent aux yeux de l’élève.

Exemple: L’élève qui explique qu’un succès en éducation physique est attribuable à ses grandes aptitudes sportives invoque une cause stable. L’élève qui explique son succès à la chance invoque une cause modifiable.

Contrôlabilité: « Est-ce que l’élève peut faire quelque chose pour réussir? »

Permet de distinguer les causes quant à la responsabilité de l’élève. Une cause est dite contrôlable lorsqu’un élève perçoit qu’il aurait pu l’éviter s’il avait voulu.

Exemple: L’élève qui explique un échec par la difficulté de la tâche invoque une cause incontrôlable.

Émotion ressenties : L’élève vit une situation, il l’explique en attribuant le résultat à une cause et cette cause engendre une émotion.

Exemple: L’élève échoue un examen de français, il explique son échec par son manque d’intelligence, il ressent donc de la honte.

3. Différences sexuelles:

– Les filles ont tendance à attribuer leurs échecs à un manque d’aptitudes dans des domaines non-conventionnels et leurs réussites à leurs efforts.

– Les garçons ont tendance à attribuer leurs échecs au manque d’efforts et leurs réussites à la possession de grandes habiletés.

4. Élèves en difficulté:

– Ils expliquent leurs échecs par des causes internes,  » je ne suis pas bon! »

– Ils expliquent leurs succès par des causes externes, « je suis chanceux! »

– Ils voient l’intelligence comme une chose stable. Ils ne croient pas que leurs efforts amèneront de meilleurs résultats. Donc, ils ne peuvent rien faire pour s’empêcher d’échouer. « Ils sont allergiques à l’effort! »

– Ils ont souvent une perception irréaliste de leur compétence. Ils sur-estiment ou sous-estiment leur capacité et sur-estiment ou sous-estiment l’exigence d’une tâche. (ils ne peuvent connaître le montant d’étude à allouer pour un examen s’ils ne connaissent pas les exigences de celle-ci.)

– Ils ont devant une tâche comme objectif principal de confirmer leur intelligence.

* Les recherches ont montré que la perception qu’un élève a de son efficacité est un meilleur indicateur que l’intelligence pour déterminer la réussite d’une tâche.

* Une piste d’intervention est de faire vivre des succès à l’élève où il pourra attribuer son succès à ses efforts. Ce qui l’amènera à croire qu’il a un contrôle sur son succès scolaire. Il est important que l’enseignant renforce les efforts de l’élève.

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Des pistes d’intervention

1. L’enseignant communique des attentes élevées aux élèves, il doit:

– Présenter les tâches comme des défis réalistes.

– Augmenter l’aide plutôt que diminuer le défi présenté par les tâches: Plus l’enseignant diminue les attentes moins les élèves vont en faire. L’enseignant doit aussi avoir des attentes égalitaires.

– Questionner de façon stimulante : distribuer également les questions.

– Enseigner à être stratégique (voir Tardif, M. 1992. Pour un enseignement stratégique.) Enseigner des stratégies efficaces : comment travailler, étudier, gérer son temps, utiliser un agenda, faire un examen, utiliser des techniques de relaxation, etc.

– Promouvoir l’effort comme moyen de réussite. Voir le rôle de l’effort et de l’habileté dans la réussite générale.

2. Un enseignant doit donner de la valeur aux matières et aux tâches scolaires. Pour ce faire il doit:

– Maintenir le momentum et le plaisir d’apprendre : Éviter les interruption et les longues transitions.

– S’assurer que les élèves sont bien informés : Inscrire au tableau les objectifs d’apprentissage.

– Insister sur l’utilité des apprentissages: « À quoi sa sert? » Faire des liens avec d’autres matières, leurs rêves, leurs objectifs personnels, leur vie de tous les jours.

– Proposer des tâches intéressantes : Demander aux élèves leurs intérêts, varier les tâches, donner des tâches d’une difficulté moyenne, donner du feed-back régulièrement, proposer des activités « actives ».

– Offrir des options: sur le contenu, sur la façon de faire, sur l’organisation sociale.

– Aider les élèves à se fixer des buts à court, moyen et long terme.

– Valoriser l’apprentissage plutôt que la performance : Évaluation privée.


INTERVENTIONS

S’analyser

Tout d’abord, il faut faire une bonne démarche d’auto-analyse de nos pratiques pédagogiques en fonction des facteurs ayant une influence sur la motivation scolaire et se poser les questions suivantes:

MES ATTITUDES PERSONNELLES:

  • Est-ce que je me présente comme une personne authentique?
  • Est-ce que je suis chaleureuse dans mes contacts avec les autres?
  • Ai-je confiance en moi-même?
  • Est-ce que j’ai un bon sens de l’humour?
  • Est-ce que je suis capable de m’affirmer et de prendre des initiatives?
  • Suis-je capable de m’engager et de réclamer de l’aide en cas de besoin?

MA CONNAISSANCE DES ENFANTS:

  • Est-ce que je prends les mesures nécessaires pour obtenir le plus d’information possible à propos de chaque enfant?
  • Est-ce que je connais le milieu socio-culturel de mes élèves?

MES RELATIONS AVEC LES PARENTS:

  • Est-ce que j’amène les parents à s’engager dans ma relation d’aide avec les enfants?

MON INTERVENTION EN CLASSE:

  • Est-ce que je sais créer un climat favorable dans ma classe, fondé sur les relations d’aide interpersonnelles harmonieuses?
  • Suis-je capable de soutenir la motivation de chaque élève?
  • Est-ce que j’assure un équilibre constant entre les divers aspects de la vie de la classe (pédagogie, bonheur des élèves, habiletés sociales)?
  • Suis-je capable d’assurer une discipline souple dans ma classe?

Les éléments qui favorisent la motivation scolaire

  1. Les attitudes intérieures de l’enseignante: l’empathie, la chaleur, l’ouverture, la tolérance, la confiance en soi, le sens de l’humour, etc.
  2. La valorisation des progrès de chaque enfant, quel que soit son rythme et le renforcement POSITIF.
  3. La capacité d’instaurer une saine discipline basée sur le respect des autres et la responsabilité individuelle.
  4. La capacité de résoudre des conflits.
  5. Un accueil de qualité le matin et le midi.
  6. Le dynamisme dans la façon d’enseigner.
  7. L’acceptation des erreurs faites par les élèves.
  8. L’écoute et la sensibilité face aux problèmes des élèves.
  9. L’élaboration d’un référentiel disciplinaire avec les élèves.
  10. Le décodage des attentes mutuelles.
  11. Le décodage des intérêts personnels ET collectifs des élèves.
  12. La possibilité donnée aux élèves, à chaque étape de l’année, d’évaluer la qualité de l’enseignement reçu.
  13. L’expérimentation de l’entraide et de la coopération en classe par le biais de dyades ou d’équipes spontanées ou permanentes.
  14. L’élaboration, avec les élèves, d’une banque de stratégies pour résoudre des conflits dans la classe.
  15. L’engagement des élèves dans la vie de la classe.
  16. La création de situations d’apprentissage intéressantes, stimulantes et signifiantes.
  17. L’utilisation et l’animation d’un conseil de coopération.
  18. Les gestes délicats posés pour souligner l’anniversaire des élèves.